Usages des tablettes tactiles et accompagnement des personnes âgées vivant avec la maladie d'Alzheimer ou une maladie apparentée
Les tablettes tactiles sont de plus en plus utilisées auprès des personnes vivant avec la maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée au regard des activités et des applications proposées.
Malgré des idées reçues concernant l’acceptation et l’utilisation des technologies par les personnes âgées, elles s’intéressent aux outils numériques et à leur apprentissage ; et cela même dans un contexte de maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée. Ces maladies chroniques et progressives s’accompagnent de troubles cognitifs (désorientation spatiotemporelle, mémoire, langage, attention…), psychologiques (dépression, anxiété…) et comportementaux (agitation, déambulation…) impactant l’autonomie et la vie quotidienne des personnes malades et de leurs proches. L’attractivité des tablettes vis-à-vis des ordinateurs tient à leur moindre coût, à leur accessibilité cognitive, à leur intuitivité d’utilisation et à leur possibilité de personnalisation. Face à un marché en plein essor, certains fabricants ont développé des tablettes dites « seniors » avec des interfaces épurées et simplifiées censées faciliter leur accès et leur utilisation. Cependant, un rapport (1) de 2018 de l’Institut National de la Consommation avec le soutien de la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie indique que, pour les personnes âgées, l’usage des tablettes simplifiées ne montre pas de meilleurs résultats que celui des tablettes classiques, ces dernières étant plus fiables et plus performantes techniquement. De plus, l’utilisation des tablettes classiques évite de stigmatiser les personnes sous-entendant qu’elles sont moins capables, et leur permet de rester connectées et intégrées dans la société tout en renforçant les liens sociaux et intergénérationnels.
Une diversité d’utilisation
Les utilisations des tablettes ciblent le cognitif, le psychologique, la vie quotidienne, l’inclusion sociale ainsi que les activités culturelles et de loisirs. Les activités les plus proposées sont des exercices de stimulation cognitive et des activités de réminiscence où tout le matériel nécessaire est disponible sur un même support. Au quotidien et à domicile, l’autonomie et la sécurité peuvent être maintenues et favorisées par des applications d’agenda, d’aide-mémoire ou de mise en relation entre les proches et les soignants. L’accès à l’e-santé est facilité avec des applications d’observance médicamenteuse, de consultations à distance ou de programmes de soutien destinés aux aidants. La tablette participe au maintien d’une vie sociale active par l’envoi de mails, le partage de photos, les appels vidéo et par des activités de groupes favorisant les interactions sociales. Les activités culturelles et de loisirs sont appréciées avec la possibilité de visites virtuelles, d’accès à l’information ou encore à une diversité de jeux, livres, magazines et journaux. Selon des études scientifiques, les activités réalisées via une tablette favoriseraient la communication, l’autonomie, la cognition, l’inclusion sociale, la qualité de vie et les émotions positives. Toutefois, la tablette ne doit ni être imposée ni être une charge supplémentaire pour l’aidant, le professionnel ou la personne elle-même.
Un guide pour faciliter l’utilisation de la tablette tactile
Afin de faciliter une utilisation et une expérience utilisateur optimale, plusieurs niveaux d’actions peuvent être envisagés. Les concepteurs de ces dispositifs doivent prendre en compte les caractéristiques sensorielles, cognitives et physiques des personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée. En effet, l’équipe du Living Lab de la Fondation Médéric Alzheimer a observé lors de tests utilisateurs des difficultés pour se souvenir des actions à réaliser pour par exemple allumer l’iPad, naviguer sur internet, des difficultés avec le toucher tactile ou encore des difficultés à gérer les notifications qui apparaissent involontairement et qui génèrent des distractions attentionnelles sur l’activité en cours. Nous recommandons ainsi que la tablette soit configurée au préalable avec l’assistance d’un aidant ou d’un professionnel afin de créer une adresse mail ou un compte utilisateur, d’enclencher les mises à jour automatiques, de désactiver certaines notifications, d’ajuster la luminosité et le contraste et de télécharger des applications selon les envies et besoins de la personne. Cela permet de personnaliser l’interface et de favoriser une meilleure prise en main ainsi qu’une utilisation optimale de la tablette. Des séances de découverte et d’apprentissage sont nécessaires pour familiariser la personne avec cet outil, dont l’utilisation autonome permettrait de renforcer le sentiment d’indépendance. Dans cette optique, la Fondation Médéric Alzheimer a publié un guide pratique intitulé « Guide utilisateur pour iPad : comprendre et réaliser les actions de base » en libre accès sur son site (2). Ce guide, réalisé pour, par et à la demande de personnes âgées vivant avec la maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée d’un accueil de jour francilien, regroupe les applications les plus communes telles que surfer sur internet, regarder des vidéos, prendre des photos ou appeler ses proches en visioconférence. Dans une démarche pas à pas, il explicite l’utilité de l’application et décrit les différents gestes à faire pour accomplir l’action souhaitée.
Pour conclure
Les tablettes sont de plus en plus convoitées pour l’accompagnement des personnes âgées vivant avec la maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée en raison de son intuitivité et de ses nombreuses possibilités d’activités et de personnalisation. Les bénéfices apportés par leur utilisation sont multiples. Toutefois, les concepteurs de ces dispositifs doivent prendre en compte les caractéristiques et besoins des personnes âgées pour en faciliter une utilisation optimale.
Références
1 Institut National de la Consommation (INC), avec le soutien de la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA). (2018). Synthèse d’étude sur les tablettes tactiles dédiées aux personnes âgées; https://www.inc-conso.fr/sites/default/files/pdf/INC-CNSA-Synthese-Etude-Tablettes-Seniors-2018.pdf
2 www.fondation-mederic-alzheimer.org
Cécilia PALMIER
Étudiante en master 2 de psychologie cognitive fondamentale et appliquée à l’Université de Paris et stagiaire au Living Lab de la Fondation Médéric Alzheimer
Jean-Bernard MABIRE
Psychologue, docteur en psychologie et responsable de l’ingénierie de recherche du Living Lab de la Fondation Médéric Alzheimer
Kevin CHARRAS
Psychologue, docteur en psychologie et responsable de Centre de formation et du Living Lab de la Fondation Médéric Alzheimer
FONDATION MÉDÉRIC ALZHEIMER
La Fondation Médéric Alzheimer propose depuis 20 ans des actions et des solutions aux professionnels, prescripteurs et pouvoirs publics pour améliorer la qualité de vie des personnes malades et de leurs proches au quotidien. Depuis 1999, elle a soutenu 429 projets d’innovation de terrain, 56 études et recherches. Elle a remis 55 bourses doctorales et attribué 22 prix de thèses et 6 prix de master 2 recherche.
Contact : living.lab@med-alz.org
@LivingLabFMA
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