Editorial Égalité entre les femmes et les hommes
Une petite impression de déjà vu dans ce titre, non ? N’a-t-on pas l’impression, au sein des entreprises, de se battre sans répit contre les inégalités, que ce soit au nom de la mixité pour mieux équilibrer les femmes et les hommes dans les métiers et filières, au nom de la parité pour permettre un égal accès aux postes de gouvernance, au nom de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles pour accompagner les femmes victimes, au nom de l’articulation des temps de vie pour œuvrer à des congés parentaux et une organisation du travail soucieuses d’harmoniser les rôles sociaux de sexe, et pour, in fine, en rassemblant tous ces volets, aboutir à des rémunérations et des retraites moins indécentes dans les écarts qu’elles affichent entre les femmes et les hommes, index et accords égalité à l’appui ?
Oui, de multiples actions sont partout conduites et les avancées sont réelles. Et pourtant, des adhérences demeurent, multiples et souvent invisibles, qui freinent les progrès, jouent comme des dissolvants des outils législatifs et des politiques volontaristes. Cet agent infiltré, c’est le sexisme, à la fois une idéologie qui repose sur l’infériorité d’un sexe par rapport à l’autre et des actions qui peuvent aller des violences sexuelles jusqu’au sexisme dit « ordinaire » ou encore du quotidien, tous ces gestes, comportements, propos, décisions, qui, l’air de rien, au nom de stéréotypes de sexe enferment femmes et hommes dans des rôles préétablis, décrédibilisent, délégitiment, disqualifient les femmes et conduisent à leur exclusion de certaines sphères et à leur auto exclusion, quand elles anticipent le caractère escarpé du chemin à parcourir.
Y a-t-il là une fatalité ? Non, bien sûr mais cette prise de conscience du sexisme et de son caractère systémique demande des réponses ambitieuses pour progresser dans le succès des mesures prises au nom de l’égalité : la mise en tension des organisations par des indicateurs de progression, voire par des quotas assortis de sanctions, la formation des acteurs, l’application du principe d’égaconditionnalité, qui consiste à conditionner les financements à leur impact éventuellement différencié sur les femmes et les hommes.
Et surtout, comme cela est fait magnifiquement dans cette revue, sensibiliser, informer, dialoguer, recourir à des experts reconnus pour éclairer tel ou tel pan de l’égalité, pour pouvoir, enrichis de tous ces points de vue, repartir avec vigueur dans le combat pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
Brigitte GRÉSY
Présidente du Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes depuis juin 2019.
Elle est l’auteure de nombreux rapports sur l’égalité professionnelle (2009), sur la parentalité (2011) et sur l’égalité entre filles et garçons dans les structures d’accueil de la petite enfance (2013) en sa qualité d’inspectrice générale des Affaires sociales, ou sur l’image des femmes dans les médias et les expertes (2008 et 2011) en tant que rapporteure de la commission en charge de cette question.
Elle a aussi publié le Petit traité contre le sexisme ordinaire (2008, Albin Michel), une étude sur le poids des normes masculines sur la vie professionnelle et personnelle de jeunes cadres en entreprise (2009) et La Vie en rose, Pour en découdre avec les stéréotypes (2014) (Albin Michel).