Revue TELECOM 193 - Le "code" extracellulaire Vers une approche thérapeutique au-delà de la thérapie génique
LE "CODE" EXTRACELLULAIRE
Vers une approche thérapeutique au-delà de la thérapie génique
Par Veronika Gocheva dans la revue TELECOM n° 193
La thérapie génique suscite un espoir majeur depuis de nombreuses décennies mais peine à démontrer son efficacité clinique en raison de son caractère non physiologique et invasif ainsi que des nombreux effets indésirables observés. La nouvelle thérapie extracellulaire s’affranchit de ces contraintes en offrant une solution thérapeutique innovante au plus proche de la physiologie cellulaire pour soigner des maladies incurables.
Thérapies géniques : entre espoir et réalité
L’évolution significative des connaissances sur le génome humain a créé un espoir majeur de traitement de maladies incurables basé sur les thérapies géniques. Il s’agit d’un concept thérapeutique visant à remplacer ou à modifier des gènes défectueux impliqués dans diverses pathologies comme le cancer ou les maladies rares. Le séquençage du génome humain et son analyse bio-informatique ont en effet permis de cartographier l’ADN et de délimiter des zones à cibler avec haute précision. Une multitude de candidats thérapeutiques ont été ainsi générés grâce notamment au développement important d’outils de manipulation de l’ADN combiné aux découvertes récentes dans le domaine de la régulation génique. Le même concept a également été appliqué à la copie du gène pour donner lieu à une autre technologie génique visant à élaborer des médicaments à base d’ARN. Les promesses dans ce domaine sont considérables, de façon à ce que des sociétés Biotech développant ces technologies sont actuellement valorisées à plusieurs milliards de dollars alors qu’elles ne possèdent pas encore de médicament issu de la thérapie génique sur le marché. L’engouement pour cette approche a par ailleurs attiré des investissements privés et publics conséquents depuis de nombreuses années.
Toutefois, les nombreux essais cliniques dans différents domaines thérapeutiques ont donné peu de résultats probants et n’ont pas permis au concept de thérapie génique de prouver son efficacité à la hauteur des attentes. En réalité, plusieurs contraintes majeures freinent l’application clinique de l’approche théorique. La thérapie génique est, en effet, très invasive et non physiologique pour la cellule car elle requiert l’introduction d’un ADN étranger à visée thérapeutique dans les cellules du patient. Le vecteur utilisé est le plus souvent viral et exploite la capacité des virus à injecter du matériel génétique dans la cellule. La thérapie génique est ainsi liée à une toxicité élevée ainsi que des effets secondaires majeurs comme des réactions inflammatoires incontrôlable ou des cancers suite à une intégration incorrecte du gène thérapeutique. Ceux-ci créent des obstacles réglementaires mais aussi industriels importants à surmonter avant d’aboutir à un nouveau médicament sur le marché. La thérapie génique soulève également des questions éthiques et représente en plus un défi important pour les systèmes de santé en raison de son coût très élevé.
Le caractère conceptuellement invasif de la thérapie génique la rendrait-il fondamentalement incompatible avec la physiologie cellulaire au point de ne jamais véritablement pouvoir fournir les résultats thérapeutiques espérés ?
Thérapie extracellulaire : surpasser la thérapie génique pour le traitement de maladies incurables
A l’inverse de la thérapie génique, une approche physiologique vise à s’inspirer des mécanismes naturels de fonctionnement cellulaire pour la conception d’agents thérapeutiques innovants. Toute cellule possède en effet des mécanismes intrinsèques de réparation ainsi qu’une capacité forte d’adaptation à son microenvironnement. Dans le cadre de la physiologie cellulaire normale, les cellules ne procèdent pas à une altération de leur ADN pour répondre à un changement de conditions ou en cas de maladies. Elles effectuent plutôt un monitoring permanent de leur microenvironnement grâce à des récepteurs présents à la surface cellulaire et perçoivent une multitude de signaux de nature différente. Des voies de communication moléculaires appelées « signalisation cellulaire » transmettent ensuite ces signaux à l’intérieur de la cellule pour lui permettre d’y répondre correctement en activant ou en inhibant notamment l’expression d’un gène ou d’un groupe de gènes impliqués dans un processus donné. Ces mécanismes physiologiques permettent à la cellule une réponse finement ajustée sans altération drastique et permanente de ses composantes tels que l’ADN ou l’ARN.
L’approche thérapeutique extracellulaire consiste à fournir à la cellule des signaux extracellulaires précis en fonction de la pathologie donnée afin de moduler avec précision l’activité de certains récepteurs et ainsi stimuler les capacités naturelles cellulaires d’adaptation et d’autoréparation. Cette approche est de par sa nature non invasive car elle n’implique pas l’introduction d’agents thérapeutiques dans la cellule ou une modification permanente de son ADN et reste extrêmement proche de la physiologie cellulaire normale. La thérapie extracellulaire s’affranchit ainsi des causes majeures d’effets indésirables observés pour la thérapie génique et offre de plus un contrôle hautement précis de la réponse cellulaire souhaitée pour une meilleure efficacité de traitement.
L’information extracellulaire fournie à la cellule sous forme de signaux moléculaires représente un nouveau « code » thérapeutique ayant le potentiel de cibler une multitude de pathologies de façon physiologique et sans effets indésirables.
Le « code » extracellulaire serait-il la réponse physiologique à la thérapie génique ?
Vers une solution thérapeutique basée sur l’approche extracellulaire
De façon très innovante, la société Biotech Histide, pionnier dans ce domaine, a mis au point une nouvelle génération d’agents thérapeutiques extracellulaires appelés CRMTM (Cell Recoding Molecules). Les CRM résultent d’une étude approfondie bio-informatique des interactions liant les récepteurs cellulaires aux activateurs naturels combinée à une expertise dans les processus de signalisation cellulaire et régulation génique. Histide a ainsi conçu une large plateforme de plus de deux-cent-cinquante-mille CRM ayant la capacité de finement moduler l’activité des récepteurs cellulaires pour recoder les cellules malades de façon physiologique et les diriger vers un état sain. Les cellules recodées peuvent ainsi reprendre leur rôle physiologique au sein des tissus de façon pérenne avec des applications dans une multitude de domaines thérapeutiques comme l’oncologie, les maladies neuro-dégénératives, les maladies métaboliques ou plusieurs maladies rares.
La généralisation du concept de thérapie extracellulaire offre un potentiel thérapeutique inédit dans un futur proche en se positionnant comme la réponse physiologique aux attentes majeures générées par la thérapie génique.
À retenir
• La thérapie génique est de nature invasive, non physiologique et génère de nombreux effets indésirables.
• La thérapie extracellulaire s’inspire des mécanismes cellulaires physiologiques de perception de signaux du microenvironnement.
• La thérapie extracellulaire ne requiert pas l’introduction d’agents thérapeutiques dans la cellule et n’altère pas l’ADN de façon permanente.
GLOSSAIRE
- ADN : acide désoxyribonucléique
- ARN : acide ribonucléique
- CRMTM : « cell recoding molecule »
Biographie de l'auteur
Veronika Gocheva est Docteur en Biophysique moléculaire et super-résolution. Elle a travaillé plusieurs années sur l’élucidation des mécanismes de régulation génique ainsi que la biologie de cellules souches et cancéreuses. Elle est co-fondateur de la start-up Histide ainsi que co-inventeur de la technologie extracellulaire CRMTM.