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09 juillet 2020

La révolution du calcul quantique

" Le meilleur moyen de prédire le futur est de l’inventer "  Alan Kay

Après la loi de Moore ? 

En 1965, Gordon Moore conjecture que la performance des processeurs progressera à un rythme exponentiel. De manière spectaculaire, cette prédiction est toujours vérifiée, mais les contraintes technologiques actuelles limitent les capacités d’évolution : stagnation de l’augmentation des fréquences d’horloge du fait d’une dissipation thermique difficile à maîtriser, limite atteinte en photogravure ou taille des transistors qui approchent une taille comparable à celle des atomes.


Pourtant, les besoins en calcul sont croissants et d’autres stratégies sont apparues ces dernières années comme par exemple l’utilisation des multi-cœurs, les FPGA (réseaux logiques programmables), le « multithreading » et même l’ingénierie logicielle et la recherche algorithmique. Malgré cela, il reste des calculs fondamentalement hors d’atteinte des ordinateurs classiques tant leur complexité algorithmique est importante.  Une autre voie pourrait prendre le relais : le calcul quantique.

           

Le calcul quantique :  une révolution technologique avec ses défis et ses promesses 

Depuis les années 1940, les ordinateurs fonctionnent selon la théorie de l’information « classique » construite à partir de « bits » (binary digits) dont la valeur est 0 ou 1. Dans un ordinateur quantique, l’information est représentée par un « qubit » (quantum bit) constitué d’objets microscopiques dotés de propriétés quantiques :            

les états observables sont quantifiés et limités à deux états, ce qui constitue le moyen de lire les résultats à l’aide de bits classiques (0 et 1),         

l’état d’un qubit est en général une « superposition » d’états observables (une combinaison linéaire qui s’écrit : |ψ⟩=α|0⟩+β|1⟩)           

l’état de N qubits est une combinaison linéaire de 2N composants, le calcul s’opère dans un espace de grande dimension et peut exploiter la possibilité d’intrication entre qubits, conférant au calcul une forme de parallélisme.           

Les machines et les environnements de développement existent déjà !           

Du point de vue technologique, IBM a choisi d’exploiter sa maîtrise du silicium en fabriquant des qubits avec des jonctions de Josephson utilisant des dépôts d’oxyde d’aluminium à très basse température (20 milliKelvins) – qubits supraconducteurs ou Transmon.            

Pour permettre d’estimer la qualité et la fiabilité d’un ordinateur quantique, IBM a introduit en 2018 une mesure : le Volume Quantique qui prend en compte différents paramètres comme par exemple le taux d’erreur et la topologie qui lie les différents qubits. Plus le Volume Quantique est important, plus la capacité d’usage de l’ordinateur est élevée. IBM s’est engagé à doubler chaque année le Volume Quantique et c’est bien ce que l’on constate depuis 2016.

Pour construire les algorithmes quantiques, IBM a également développé une bibliothèque de programmation pour Python appelée Qiskit (Quantum Information Science Kit) distribuée en mode Open Source sur qiskit.org. Elle inclut deux fonctionnalités majeures : la première est celle de pouvoir travailler au plus près des qubits pour améliorer les performances des « circuits quantiques » afin de pouvoir ajuster les paramètres de compilation et d’optimisation du circuit avant exécution. La deuxième est la capacité d’accéder à une bibliothèque de composants logiciels de « haut niveau » pour faciliter la programmation.

 

Une stratégie collaborative d’innovation et de progrès           

Dans ce domaine, la stratégie d’IBM est claire : depuis mai 2016, ses ordinateurs quantiques sont disponibles librement et gratuitement en ligne sur le « Cloud » et leurs caractéristiques techniques sont publiques. Chacun peut donc accéder à huit machines réelles avec Python et Qiskit ou via le composeur graphique de l’environnement IBM Quantum Experience qui propose également une documentation et des exemples de programmes directement utilisables.           

D’un autre côté, IBM a pour ambition de constituer un écosystème mondial de recherche et développement : le réseau « IBM Q Network » compte au début 2020 plus de 100 membres qui ont la possibilité d’échanger et d’accéder à un ensemble réservé d’ordinateurs quantiques de générations plus récentes et doté d’un nombre de qubits plus important (20, 28 et 53).          

Ce réseau regroupe des universités parmi les plus prestigieuses, les start-up les plus actives, et un grand nombre d’entreprises dans les domaines de la chimie, de l’automobile, de la finance. Il s’est donné pour objectif de développer les algorithmes quantiques qui permettront d’ici quelques années d’identifier et produire les cas d’usages où l’ordinateur quantique sera plus avantageux que tout ordinateur classique, c’est à dire « Le Quantum Advantage ».

           

Une révolution  dans l’informatique ?           

Le fonctionnement d’un ordinateur quantique sera celui d’un modèle hybride, c’est-à-dire couplé à un ordinateur classique en tant que coprocesseur de calcul spécialisé dans la résolution de problèmes spécifiques.           

Il se présente comme une technologie de rupture, probablement en mesure de résoudre des problèmes numériquement très complexes, hors de portée des ordinateurs classiques, pour un large ensemble de domaines comme par exemple la science des matériaux, la chimie des petites molécules, la finance, certains algorithmes de l’intelligence artificielle ou encore les problèmes de logistique.           

Par exemple, le calcul quantique pourrait prédire à terme un moyen de capter le CO2, de concevoir de nouveaux matériaux pour stocker l’énergie électrique dans une batterie « propre » et légère, de trouver des substances actives pour la conception de nouveaux médicaments… les exemples avec des impacts déterminants sur notre société sont nombreux.

Dans le domaine financier, les algorithmes d’analyse de risques sur les portefeuilles d’actifs sont une cible de choix et l’on sait déjà que des algorithmes quantiques pourront apporter une accélération quadratique pour certains de ces calculs.


Olivier Hess

IBM Quantum Ambassador & IBM Quantum Hub France - Executive Technical Leader.

A dirigé le centre Européen HPC (Calcul scientifique de Haute Performance) puis l’Innovation Lab à Montpellier (SmartCity, BigData…). Depuis 2017 Olivier fait partie des équipes « Ambassadeur IBM Quantum » pour l’Europe. Il pilote l’initiative IBM Quantum France et les partenariats stratégiques.
Formation : PhD Thesis in Quantum Chemistry, Paris VI University, France, 1989
@OlivierHess1


Jean-Michel Torres  

Chef de Projets, IBM France Quantum Team

Supelec 88, travaille à IBM France depuis 1989, où il a occupé de multiples fonctions (support technique de grands comptes, fabrication, logistique, transformation des processus et des organisations).  Certifié Project Manager Professional du PMI® depuis 2011.
A rejoint l’équipe Quantum Computing à IBM en 2018.
@jmit34

 

 

 

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