INGENIEUR, DOCTEUR ET SERIAL ENTREPRENEUR

Fred Potter, je crois que tu as fait un doctorat après Télécom Paris. Pourrais-tu nous expliquer ce choix / ce que cela t'as permis d'apprendre en plus des Télécoms ?

Mon parcours scolaire a commencé par les classes préparatoires, durant lesquelles j’ai trouvé une bonne méthode de travail. A Télécom Paris j’ai acquis de solides bases technologiques et j’ai appris à résoudre des problèmes fermés, ceux pour lesquels on sait qu’une solution existe. J’ai ensuite opté pour un doctorat afin de me confronter à un problème ouvert. En effet, lorsqu’on travaille sur sa thèse, on se trouve face à une page blanche et on doit mettre en place une liste d’actions pour résoudre de nombreuses inconnues. C’est une façon de réfléchir et d’agir qui m’a ensuite été utile en tant qu’entrepreneur.

Pourrais-tu revenir sur le choix de ton premier emploi ? Et les apports de Télécom Paris / de ton doctorat pour mener à bien tes missions ?

Après ma thèse à l’université, j’ai commencé par un premier poste technique chez l’opérateur télécom Kaptech. Ce premier poste m’a permis d’acquérir un vrai savoir-faire professionnel, de découvrir une culture d’entreprise, d’appréhender le rôle d’un investisseur, d’un contrôleur de gestion, d’un service juridique, d’acquérir des bases de droit ou encore de détecter de potentiels business qui pouvaient être développés pour cette entreprise.

Commencer par le salariat avant de créer sa start-up est une vraie force.

Avec le recul, pourrais-tu donner des conseils à d'autres diplômés qui aimeraient se lancer dans l'aventure entrepreneuriale ? Nous expliquer comment ta première partie de carrière en entreprise a pu t'aider à faire des choix en tant qu'entrepreneur ?

Selon moi, commencer par le salariat avant de créer sa start-up est une vraie force. Il est très important de se confronter au terrain pour connaître tous ces aspects pratiques avant de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale. De façon très concrète, ma première expérience professionnelle m’a permis de trouver le business de ma première entreprise, un financement, mes associés et mes clients.

Je crois que tu as fondé puis revendu plusieurs sociétés. Pourrais-tu revenir sur ces différentes étapes ? (Différences entre elles, facteurs de succès : prise de décision de vendre ...)

Tour à tour, j’ai créé :

• Cirpack (2000), une société qui développe des centraux téléphoniques permettant aux opérateurs télécom de produire les offres de téléphonie sur ADSL,

• Withings (2008), une des premières entreprises dans le domaine de la santé connectée qui crée des produits tels que la balance connectée ou des trackeurs d’activités,

• Netatmo (2011), une entreprise qui conçoit des produits intelligents pour une maison plus sûre et plus confortable.

Ces trois entreprises ont été vendues à des grands groupes : Thomson Multimedia en 2005 pour Cirpack, Nokia en 2016 pour Withings et Legrand en 2018 pour Netatmo.

Dans ces trois cas, ma démarche a été de développer ces entreprises comme si je ne souhaitais jamais les vendre. Il s’agit donc d’identifier en amont un vrai marché, afin de proposer un vrai service pour de vrais clients. La question des ventes s’est ensuite posée naturellement et je les ai acceptés quand j’ai senti que c’était le bon moment.

Quel a été pour toi le déclic pour fonder ta première société ?

L’idée de Cirpack m’est venue en étant chez Kaptech. Pour Withings et Netatmo après avoir équipé les foyers de boxes internet, je me suis demandé quels autres objets connectés pourraient être utiles pour les utilisateurs ? Withings et Netatmo ont proposé deux réponses différentes à cette même question.

Mais au-delà de ces premières idées, créer sa start-up est un processus analytique très structuré. Il s’agit de comprendre le comportement des consommateurs et leurs besoins, puis de trouver une façon concrète de donner vie à ces idées.

Quel est ton rôle actuellement chez Legrand ?

Suite à la vente de Netatmo à Legrand, je suis devenu CTO du programme Eliot de Legrand. Mon rôle est de superviser la conception des offres connectées du groupe. Je m’assure également de la réussite de l’acquisition de Netatmo par Legrand, non seulement au travers de mon nouveau poste, mais également en participant à une bonne intégration des deux cultures d’entreprise.

De façon générale, pour qu’une fusion réussisse il faut un respect mutuel, une complémentarité et une volonté d’accompagner la transition ensemble. C’est le cas de la fusion entre Netatmo et Legrand, qui se fait en collaboration, avec un cadre culturel commun et le respect du travail de chacun.

Est-ce que tu investis dans d’autres entreprises ? Quelles sont les start-up prometteuses du moment ?

Aujourd’hui j’investis dans des start-up françaises et dans certains cas je suis aussi membre de leur Conseil d’Administration. Deux belles promesses selon moi ? EnergySquare et NumWorks.

Biographie de l'auteur

Fred Potter obtient son diplôme d’ingénieur Télécom Paris en 1993 puis un doctorat en micro-électronique à l’Université Pierre et Marie Curie en 1996. Il rejoint ensuite la société Kaptech, un opérateur télécom. En 2000, il crée Cirpack, une société qui développe des centraux téléphoniques permettant aux opérateurs télécom de produire les offres de téléphonie sur ADSL. En 2008, il cofonde Withings, qui participe à la création du segment de marché des objets connectés liés à la forme, la santé et la mesure de la performance sportive. Withings est revendue à Nokia en 2016. En 2011, il fonde Netatmo, une entreprise qui conçoit des accessoires dans le domaine de la maison intelligente. En novembre 2018, Netatmo se fait racheter par la groupe Legrand et Fred Potter devient CTO du programme Eliot pour contribuer à la conception des offres connectées du group.