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01 juillet 2024

LA DISSUASION EN FRANCE, ARME NUCLÉAIRE, ARME POLITIQUE

Publié par Philippe Wodka-Gallien | N° 213 - IA et Santé & Numérique et Défense

Notre monde est durablement « nucléaire». Nous pouvons le déplorer, mais nous ne pouvons ignorer la nature humaine. La dissuasion, en tant que concept de défense, est apparue bien avant l’ère nucléaire, mais c’est l’arme atomique, par son caractère massif, qui lui donne sa pleine efficacité. Cette arme nouvelle n’a servi en temps de guerre qu’une seule fois : les 6 et 9 août 1945 sur Hiroshima et Nagasaki. Devenue stratégie de défense intégrale, la dissuasion est au cœur d’un paradoxe inchangé depuis 1945, depuis six décennies s’agissant de la France en référence au premier essai réalisé le 13 février 1960. Ce paradoxe est parfaitement exprimé par le symbole des Forces aériennes stratégiques françaises : une épée maintenue dans son fourreau mais tenue par un gant d’acier. L’héraldique est inspiré par le temps des chevaliers fixant ainsi l’ADN de la force de frappe dans une histoire guerrière millénaire. Louis XIV fait inscrire sur ses canons une devise : « Le dernier mot du roi ». Bref, être toujours prêt au tir, s’entraîner, pour ne jamais avoir à lancer en vrai les armes. En 2024, une force nucléaire veille sur la France, sanctuarise son territoire. Oui, 60 ans déjà, car le 7 octobre 1964 marque la première tenue d’alerte des Mirage IV, leur bombe atomique fixée sous le fuselage. Abrités dans leur casemate, ils sont parés à un décollage immédiat sur ordre du président de la République. La posture ne vaut que s’il elle est permanente. Cet anniversaire de la force de frappe, 60 ans, est donc l’occasion de revenir sur un dispositif inédit au centre de notre diplomatie et de notre défense. Objet de débat, la force atomique française est le produit d’une continuité politique remarquable recevant un soutien massif de l’opinion (au-dessus de 80 % selon de nombreux sondages). Sa légitimité s’est consolidée à mesure que la guerre s’installe aux marges de l’Europe, outre le risque persistant de prolifération. Pour la France, comme pour les autres États dotés, la stratégie de défense se combine à la force politique de l’arme nucléaire.

 


Vue d’artiste du laser mégajoule, instrument du programme Simulation du Commissariat à l’Énergie nucléaire. Photo CEA-EA. Un peu de stratégie Cette force a été taillée selon trois impératifs : la suffisance, la permanence, la crédibilité opérationnelle. Le dispositif est au sommet de l’architecture de défense. Sanctuariser le territoire, la force de frappe est liberté d’action pour la politique extérieure de Paris. Faisons un bond dans le temps. L’essentiel de la grammaire française de l’atome...
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Auteur

Philippe Wodka-Gallien

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